Indus-Black (post-)moderne d'un électronicien dépressif.

Avec un nom comme celui d'ANGST SKVADRON, mes yeux ne pouvaient que loucher dessus et me demander ce qu'était ce bidule. Et puis, voir que ce disque s'intitule « Flukt » m'a encore plus intrigué. Cela fait penser à Flux, je trouvais ça intrigant. Puis m'apercevoir qu'Agonia Records – label douteux mais d'envergure internationale – l'avait produit me titillait encore un peu plus. Ce, jusqu'à ce que je constate que c'était encore là un autre projet musical de l'hyper-actif leader du groupe de Brutal Black Metal URGEHAL, T.B. T.B est autrement impliqué dans le très bon et darkthronesque BEASTCRAFT que je recommande chaudement, ainsi que dans le groupe progo-mélo-black IN LINGUA MORTA, également sur scène avec Satan et KRYPT et autrefois actif dans le culte KVIST... T.B est un vieux de la vieille, on l'aura compris. J'oublie d'ajouter qu'il est secondé de son pote L.F.F pour la boite à rythme, le piano/synthé et les nombreux instruments bizarroïdes sollicités. Cette fois-ci, notre bon Norvégien à la voix de Satyr se met au boulot pour nous pondre un « Flukt » pas aussi Black Metal avant-gardiste que le label le laisse penser.

Certes, l'électronique a sa place dans ce premier effort. Y apparaissent des sonorités technoïdes, des voix modifiées, des samples, soutenus par une production puissante et moderne qui nous changent des habitudes du genre. Rappelant par ailleurs fortement ce qu'ont pu faire dans un autre temps THORNS ou MYSTICUM, « Flukt » ne remémore néanmoins nullement ce qu'ont pu réaliser jusqu'ici des ténors comme BLACKLODGE ou ABORYM. Non, l'Indus Black Metal d'ANGST SKVADRON se tourne plus vers des sonorités résolument norvégiennes, dont SATYRICON, mais aussi vers trois formations suédoises inattendues : ONDSKAPT, LIFELOVER et SHINING. Il n'y a rien à y faire, quand j'écoute « Flukt », je ne cesse de penser à ces quatre derniers, même si ANGST SKVADRON est plus dépressif et plus lent. Pourtant, c'est pas faute au Monsieur de vouloir instiller une personnalité hors du commun à son Black Metal : non, T.B, s'il joue ici un metal de qualité, ne propose rien de neuf dans sa recherche, si ce n'est une production béton, claire et un peu claquante, agrémentée de sons hérités des années 80 et plus vieux...

Après « U.F.O », une intro digne des errances électroniques tirées de la bande originale de la Soupe aux Choux, sort du chaos cosmique « Silent Light, Alien Night », piste énergique qui ne va pas vous décoiffer, mais qui recèle des mélodies accrocheuses quoique trop Satyriconniennes, voire trop Thorniennes ! C'est bon, mais tant de fois entendu ! « A Song to the Sky » rappelle lui les compositions torturées d'ONDSKAPT, plus quelques apports technologiques encore timides. Le "tube" « Negativitetens Kveletak » (écoutable sur le Myspace d'ANGST SKVADRON : http://www.myspace.com/angstskvadron) tombe à pic pour plomber le moral et proposer du neuf : une voix d'homme claire, même si peu travaillée et des lignes de guitares qui le sont moins, digne du génial LIFELOVER. Mais le hit a l'avantage d'avoir des riffs entêtants. Vient l'anti-blackmetallique « The Astroid Haemorhoïds and the Drunken Sailor », piste surprise instrumentale, "cartoonesque" et aux soli surprenants, qui résonne comme une B.O de film d'action des sixties, jusqu'à sa substitution sur le dernier tiers par un plan acoustique relevé de violoncelle qui n'aurait pas dépareillé chez un Sergio Leone. Vraiment surprenant ! On replonge dans la déprime et l'hypnose avec les tristes « Slaves of Mental Distortion » et sa suite : « Beyond Andromeda ». C'est « Satan » qui fait office d'outro (enfin... on ne fera pas de jeux graveleux hein ! Cf phrase suivante). Cette fin est assez dérangeante, mêlant prises de son de partouzes d'énervés, très explicites, et bruits plus cosmiques menaçants. L'outro s'achève sur le gimmick ritualistique, plus Black Metal, de la précédente piste.

Je suis partagé quant à ce « Flukt » : d'un côté, quand on écoute le Black Metal stricto sensu, on n'entend rien d'original. C'est du réchauffé de réchauffé dépressif, très rarement agressif et maléfique et que la scène Norvégienne dans un premier temps, puis suédoise dans un suivant a grandement marqué... Le vide interstellaire de personnalité est un atout impardonnable. Je soupçonne même le duo nordique de vouloir nous mettre à l'épreuve, exécutant un cadavre exquis de pistes connues avec une nouvelle sauce de leur goût par-dessus... Ou alors de manquer de recul sur ses écoutes récentes. En fin de compte, est-ce une grosse blague ??? D'un autre côté désormais, il est vrai que ces apports d'instruments rarissimes dans le Black Metal et surtout, ces sons dignes des films d'extra-terrestres des seventies sont séduisants... Néanmoins, ils n'apportent rien d'exceptionnel à l'ambiance. C'est curieux oui, mais pas vraiment novateur. Mais surtout je me répète : la valeur ajoutée ne se ressent pas vraiment. C'est dommage, car c'est un faux raté : les mélodies suicidoïdes sont archi-convenues pour le Black Metal, mais elles restent de qualité. Et cette production moderne et ces sonorités malgré tout bienvenues soufflent un vent de fraîcheur sur un genre Black Metal en manque de respirations telles qu'en propose ANGST SKVADRON.

Après réflexion, je ne peux raisonnablement évaluer « Flukt » que moyennement, l'affaire ne sentant pas vraiment bon, ce side-project ressemblant à trop de formations connues. Mais « Flukt » mérite assurément la découverte pour le reste. Il ne peut laisser indifférent. A mon avis, on sera soit partagé à son égard comme moi, soit on le détestera, soit on l'adulera.

ANGST SKVADRON - Flukt

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